MASCULINISME Z
Cela fait plusieurs mois que j'ai l'idée de faire un article sur le sujet ; vous savez, ces pauvres hommes désorientés par la liberté de plus en plus grande que prennent les femmes. Elle provoque une remise en cause en profondeur des codes sociaux à tel enseigne que les hommes y perdent leur latin, éprouvent de grandes souffrances de ne plus avoir les repères habituels que sont la virilité affirmée, une violence qui tout de même doit montrer qui est le maître ici.... Et c'est la crise !!! J'ai lu des articles intéressants sur ce stratagème que le patriarcat met en place pour garder sa toute puissance sur les femmes et la dangerosité de ce concept. Et voilà que Anne Cécile Mailfert, de la Fondation des Femmes, met ce phénomène dans la lumière brutale de l'actualité grâce à sa lettre au représentant en chef des masculinistes de France qui brigue la fonction de Président de la république. Je vous la lis : "Monsieur Eric Zemmour, J’ai mis une éternité à vous écrire. Au fond de moi, c’était vous faire trop d’honneur que de joindre ma voix à votre cortège médiatique. Vous n’étiez que le symptôme d’un vilain trouble de l’élection. Mais il semble que vos outrances fassent désormais de vous une référence. Et si vous devenez effectivement candidat, il est temps d’entrer dans le débat. Car si vous vociférez sur l’immigration, votre véritable obsession se cache au niveau du pantalon. Vous avez le mérite de la constance, et contrairement à ce que disent certains, vous disposez depuis toujours d’un programme. Votre projet, c’est la soumission des femmes. Je ne reviendrai pas ici sur les nombreuses accusations de violences sexuelles à votre encontre. Je me contenterais de vos écrits et de vos interventions. Plusieurs féministes, à commencer par Martine Storti, ont décrypté vos propos, depuis votre livre « Le Premier Sexe ». Chez les femmes, il y a pour vous tout à dominer et rien à sauver. Vous prêchez l’homme prédateur, et regrettez le temps où l’on pouvait, je vous cite "glisser une main concupiscente sur un charmant fessier féminin". Bien que défenseur de la Collaboration, vous justifiez les tontes à la libération. Une femme ne réussirait que grâce au droit de cuissage. Etre dirigé par une femme vous ferait outrage. Vous souhaitez que les femmes restent à la maison et vous offusquez que des hommes puissent s’occuper de leurs rejetons. Vous remettez tout en question : la parité, l’égalité salariale... Que ce soit en politique ou au football, pour vous lorsque le féminin passe, le monde trépasse. En réalité vous n’avez rien inventé. Votre idéologie porte un nom : c’est le masculinisme. Ce mouvement de pensée encore peu connu ici a émergé dans les années 1990 aux Etats-Unis et au Canada. Il théorise le déclin masculin suite aux progrès des droits des femmes, et les combat. Premier candidat masculiniste en France, vous êtes de ce fait un candidat d’importation étrangère. Vous affirmez que seul l’islamisme tue. Mais vous oubliez un peu vite que votre idéologie masculiniste porte la responsabilité d’attentats sanglants, depuis l’Ecole Polytechnique de Montréal en 1989. Si vous prétendez combattre l’islamisme, vous êtes de fait son cousin germain, car vous partagez avec lui un même but : soumettre les femmes. Pour vous, sauver le patriarcat, c’est sauver la France. Mais cela prouve que vous ignorez tout des valeurs et des traditions de notre pays. Avant d’être une identité, la France est une idée : liberté, égalité, fraternité. L’égalité est une conquête et la liberté ne se négocie pas. Cette devise, les femmes dans toute leur Histoire se sont battues pour la réaliser. Si nous ne sommes pas un « sexe faible », nous sommes sûrement votre plus gros point faible. Et comptons bien le rester." Cet avatar Z est le dernier d'une histoire qui remonte à si longtemps. J'en veux pour preuve cette phrase relevée par Francis Dupuis Déry, professeur de sciences politiques, à l'Université du Québec à Montréal. Elle est extraite d'un essai intitulé « la crise de la masculinité, autopsie d'un mythe tenace » sorti en France en février 2019 aux éditions du Remue-Ménage. Et j'ai repris les termes de son analyse rassemblés dans un interview publiée le 2&3 février 2019 pour Libération. Tout d'abord la phrase :"les femmes sont devenues si puissantes que notre indépendance est compromise à l'intérieur même de nos foyers, qu'elle est ridiculisée et foulée aux pieds en public." Elle pourrait être citée dans un discours de ce siècle. Et bien, elle a été prononcée par Caton l'ancien, homme politique et écrivain romain, en 195 avant JC. Ce polémiste réagissait à l'opposition des femmes romaines contre une loi leur interdisant de conduire des chars et de porter des vêtements colorés ! Et maintenant voilà le mouvement réactionnaire qui se sent pousser des ailes avec cette candidature ultra médiatisée. À qui profite le crime ? Nous sommes en 2006 et le polémiste Z écrit lui dans un livre appelé « le premier sexe » : (il fallait oser!) « face à cette pression féminisante, indifférenciée et égalitariste, l'homme a perdu ses repères. » Ce personnage, maintenant candidat officiel, fait depuis de nombreux mois un tabac dans les médias avec ses idées « plus réac, tu meurs ». D'emblée, Dupuis-Téri explique que quelle que soit l'époque, quel que soit le lieu, le même phénomène se produit : l'homme se plaint, se dit en danger car n'ayant plus ses repères aussitôt que la femme dépasse un tant soit peu le rôle que le patriarcat lui a assigné. Il constate que cette crise a "toujours à peu près le même canevas et est portée par des hommes qui occupent des situations privilégiées." Et en ce moment, on retrouve ce discours comme quoi les hommes ne sont plus viriles, perdent leurs repères et c'est la faute des femmes qui remettent en cause les schémas traditionnels. Elles ne sont plus là où les hommes les attendent...et ils ne supportent pas. Tout est à revoir : la tenue vestimentaire, les métiers, la présence des femmes dans la vie publique, à priori réservée aux hommes. Déstabilisés, les hommes se sentent "en danger, désespérés, perturbés, perdus parce qu'ils n'auraient plus de modèle. C'est une rhétorique qui porte fondamentalement sur la différence entre les sexes, elle réaffirme une opposition économique, une opposition politique. On veut surtout réaffirmer une suprématie masculine dans ces domaines." On pourrait dire ça autrement : dès que les femmes cherchent à s'émanciper, ces messieurs font une crise pour ne pas perdre les privilèges du patriarcat. La règle est la domination des hommes et les femmes DOIVENT rester à la place qui leur est assignée par les hommes. Il donne un exemple concret : « Il y a cinq siècles, par exemple, au sein des cours royales en Angleterre et en France, le roi, des évêques et des intellectuels considèrent que les hommes à la cour commencent à avoir des comportements efféminés. En parallèle – et c'est toujours comme ça avec ce discours de crise – les femmes ne restent pas à leur place. Elles empiètent sur des domaines considérés comme masculins. »
Avant de poursuivre, nous allons écouter Samuele qui chante LA REVOLTE
Pour contraindre les femmes à revenir dans la doxa patriarcale, tous les arguments sont bons : les religions délivrent depuis toujours un discours qui oblige les femmes à rester sous la dépendance masculine, d'accepter les souffrances qui en découlent pour aller au paradis après la mort ; la patrie demande aux femmes de faire des enfants pour les futures guerres, etc. Ce comportement antiféministe n'épargne pas l'extrême gauche qui affirmait que les revendications des femmes obligeaient à se détourner de la lutte anti-capitaliste, priorité entre toutes : les syndicats se sont opposés au travail des femmes qui prenaient un emploi pour un homme. » Francis Dupuis Déry résume : "Ce sont toujours un peu les mêmes clichés et les mêmes raisonnements circulaires. Ce sont d'immenses généralités qui cherchent des références hors contexte, que ce soit dieu qui nous a fait comme ça, ou la nature avec la chasse aux mammouths et la préhistoire, ou la biologie avec la taille des crânes. Selon qui parle et où on se trouve, il y aura toujours une bonne explication. Et les femmes sont toujours comme on veut qu'elles soient : douces, passives, attentives, attentionnées, surtout pas combattantes, car la compétition est évidemment une caractéristique masculine. Ce qui est inquiétant dans cette conception, c'est que si il y a un conflit entre les deux sexes, on annonce déjà qui va gagner puisque le combat et la force sont d'un seul côté. Le comble de l'absurde c'est qu'on va associer le principe même de l'égalité à la féminité et celui de la hiérarchie et de la structuration organisationnelle à la masculinité. Donc l'égalité provoque mécaniquement une crise de la masculinité, ce qui est incroyable au niveau politique et ne laisse pas beaucoup d'espoir. "
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