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Le 30 octobre dernier, le Sénat a voté une proposition de
loi visant à interdire l'écriture inclusive. 221 sénateurices
contre 82. C'est dire si il y a un consensus à Droite sur ce que doit être
"notre belle langue française".
Le sénat donne la définition suivante de
l'écriture inclusive : "les pratiques rédactionnelles et
typographiques visant à substituer à l'emploi du masculin, lorsqu'il est
utilisé dans un sens générique, une graphie faisant ressortir une forme
féminine."
C'est triste à pleurer. C'est clair que
si le Sénat n'y voit qu'une « pratique rédactionnelle », ça n'est vraiment pas suffisant. Et puis,
c'est une femme qui est à l'origine de ce texte. Pascale Gruny est élue dans
l'Aisne. D'ailleurs, elle ne veut pas être appelée "sénatrice" ,
ce qui est contraire aux circulaires du 11 mars 1986 relative à la féminisation
des noms de métier, fonction, grade ou titre et du 6 mars 1998.
Et puis, le
même jour, le président de la République, à l'occasion de l'inauguration de la
Cité Internationale de la langue française à Villers Cotterêts dans l'Aisne, a
déclaré que "dans cette langue, le masculin fait le neutre. On n' a pas
besoin d' y ajouter des points au milieu des mots ou des tirets." et
qu'il ne fallait pas céder aux airs du temps en validant cette fameuse écriture
inclusive.
Il a tout faux le Président de la
République. Je pense même qu' il devrait se cantonner à son métier de président
et d'arrêter de dire des bêtises. N'est pas linguiste qui veut. Le masculin est
masculin, comme son nom l'indique. Il n'est donc pas neutre. Non, non, il ne
peut pas cumuler. C'est bien pour ça que les féministes se bagarrent pour que
les choses soient claires dans notre langue, que les deux genres soient
reconnus à égalité... Et neutre ? Ben y en a pas. Point barre. À part le
"on", y a pas. Pour un pluriel non genré, "they" en
anglais... On n' est pas en Allemagne avec "das" ou en Angleterre
avec "it" qui sont singuliers et neutres. Donc il faut réinventer des
mots qui vont permettre d'affiner la pensée et ENFIN remettre le féminin à sa
place qui est à égalité avec le masculin. De Vaugelas, à la tête de l'Académie
Française créée par Richelieu douze ans plus tôt, avait dit aussi une grosse
bêtise : "le masculin est plus noble que le féminin".
C'était 1647. Et c'est à partir de cette idéologie que la grammaire a modififé
la langue pendant des siècles. A la Révolution, une requête des femmes dans
un projet de décret à l'Assemblée Nationale en 1792 dit : « Le genre
masculin ne sera plus regardé, même dans la grammaire, comme le plus noble
attendu que tous les genres, tous les sexes et tous les êtres doivent être et
sont également nobles. » Cette phrase anéantit à elle toute
seule l'affirmation faite à Villers Cotterêts !!!!! Et au XXI ème siècle,
Monsieur le Président, on doit pouvoir rectifier cette pensée et adapter
l'écriture après le mouvement # MeToo. Cette requête replace d'emblée l'enjeu
de la langue ; il ne s'agit pas que de points ou de tirets mais la
traduction d'une pensée globale qui affirme l'égalité dans notre République.
C'est pas rien tout de même ! Et vous pourrez le dire aux
sénateurices !!!!
Je comprends bien dans l'esprit du
Président de la République que #MeToo est en fait une mode sans lendemain,
comme le yéyé ou les mange disque et qu'il s'agit de rester au dessus de cette
vague en gardant bien à l'esprit que nous sommes dans une société patriarcale
et que l'écriture doit être à la hauteur de cette noble société. L'égalité
femme/homme ? Ça passera ? L'air du temps...
Ce qui me gène aussi, c'est qu'il jette l'eau du bain avec
le bb. Je veux dire par là que certaines versions de l'écriture inclusive sont
effectivement pas très heureuses et compliquent la lecture. Je ne suis pas très
fan du point médian mais je tâtonne. Comme tout le monde. Cette technique n'a
pas dix ans et déjà on veut l'interdire. Gardons le principe qui me paraît
essentiel et travaillons à trouver des formulations qui soient le plus
accessibles. Le français est une langue vivante et donc évolue de manière
permanente. Je propose à Monsieur le
Président de la Ré-pu-blique de lire le
« guide pratique pour une communication publique sans stéréotype
de sexes » datant de 2015 et réactualisé en 2022, édité par le Haut
Commissariat à l'Egalité entre les femmes et les hommes, une instance
gouvernementale. Il s'adresse aux administrations et donne des
pistes pour l'appliquer ; il fait déjà des propositions intéressantes. Il
faut continuer dans ce sens. Tiens, je le conseille ausi à tous et toutes les
sénateurices qui ont voté Pour la suppression de l'écriture inclusive afin
qu'iels comprennent cet enjeu et
constatent que dans certains exemples, des simplifications permettent une
meilleure application de la langue. Il est notamment préconisé la règle de
proximité qui signifie que les mots sont accordés avec le terme le plus
rapproché : « les sénateurs et les sénatrices sont mal informées
et ont des préjugés sexistes sur
l'écriture inclusive ». J'ai aussi écrit les mots par ordre
alphabétique : les sénateurs et les sénatrices. Il est aussi indiqué
d'utiliser le féminin dans les messages adressés à tous et toutes. Est-ce que
ces exemples sont de nature à être interdits par le Sénat ? Favoriser
l'usage de mots épicènes ? C'est si grave que ça ? Je rappelle que
les mots épicènes sont des mots aussi bien féminins que masculins ; élève,
membre ou indique un groupe de personnes tels que les individus ou les
personnes qui parlent du peuple, du public.... Moi, je propose de multiplier
les mots épicènes comme bébé .... Y a de quoi se scandaliser ?
Je vais vous
énumérer quelques recommandations faites par ce guide qui ne peuvent que
satisfaire Madame Gruny, avec 125 autres sénatrices au milieu de 348
sénateurices soit un tiers :
•
Éliminer toutes expressions sexistes
•
Accorder les noms de métiers, titres, grades et fonctions
•
User du féminin et du masculin dans les messages adressés à
tous et toutes Utiliser l’ordre
alphabétique lors d’une énumération
•
Présenter intégralement l’identité des femmes et des hommes
•
Ne pas réserver aux femmes les questions sur la vie
personnelle
•
Diversifier les représentations des femmes et des hommes
•
Veiller à équilibrer le nombre de femmes et d’hommes - Sur
les images et dans les vidéos - Sujets d’une communication - À la tribune
d’événements, ainsi que dans les lieux de parole - Parmi les noms de rues, des
bâtiments des équipements, des salles ;
•
Former des professionnel.le.s et diffuser ce guide
« Contrairement aux assemblées, aux conseils d’administration, aux cabinets ministériels, et plus généralement à tous les lieux de pouvoir, la langue française n’a pas besoin d’être « féminisée ». Elle est équipée pour l’égalité. Si nous nous satisfaisons d’énoncés comme « Les agriculteurs sont en colère » ou « Les Français ont accueilli cette mesure avec satisfaction », ce n’est pas que les mots agricultrices et Françaises soient manquants ou ignorés. C’est que le sort ou l’avis des femmes de ces groupes ne nous intéresse pas vraiment : sans doute sont-ils semblables à ceux des hommes – qui d’ailleurs sont souvent les seuls à être interrogés ou cités. Autrement dit, c’est que nous sommes sexistes » ajoute Eliane Viennot, linguiste, dans la version 2022 du guide.
Car il ne faut pas oublier que notre belle langue française qui démontre ainsi une vitalité formidable est de plus en plus mal connue et appliquée par la population. Elle est encombrée de mots anglo saxons qui la polluent et qui n'ont pas l'air d'inquiéter nos sénateurices plus que ça. Et que le niveau en français devient problématique. L'écriture inclusive me paraît être un outil très utile pour expliquer la langue toute en lui donnant du sens, ce sens qui est écrit au fronton des mairies de la Ré-pu-bli-que.... É-GA-LI-TÉ. ! Cette lutte se fait aussi par la compréhension et l'application de ce qu'est l'égalité ! Et l'écriture inclusive fait partie de ces outils. J'irai jusqu'à ajouter que nous pourrions même revoir cette devise en appliquant l'écriture inclusive : LIBERTE- EGALITE- ADELPHITE (frères et sœurs ). Bon, mais peut-être que je vais un peu vite ?
Est-ce que Madame la Sénatrice a
compris l'intérêt de l'écriture inclusive ? Elle pourra l'expliquer à ses copains
et copines d'amphi !!!!! Elle va comprendre tout le sens du mot
« sexisme ». Bon courage.
Féministes tant qu’il le faudra
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