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La Banalité du Patriarcat
Le procès qui se déroule actuellement au tribunal d'Avignon est à de nombreux égards exceptionnel. Je rappelle les faits : il s'agit du procés d'un homme, maintenant septuagénaire, qui a utilisé un site internet pour que des inconnus viennent violer en sa présence sa femme droguée et en état d'inconscience telle qu'elle ne se souvient de rien si ce n' est les problèmes de santé liés à ces médicaments et aux multiples pénétrations, dont elle ne comprenait pas la raison. Cela a duré une dizaine d'années et c'est le hasard de la plainte des femmes qui lui reprochaient de regarder sous leur jupe dans un super marché qu'il a été défait. Il a filmé les scènes de viols méthodiquement qui ont permis de retrouver une cinquantaine de violeurs sur 80 hommes concernés qui auraient répondu à l'annonce faite sur internet. Il n'a jamais demandé d'argent.
En tant
que anarcha-féministe, je voudrais beaucoup insister sur le fait que nous
sommes en présence d'un cas d'école qui dit toute l'horreur du système
patriarcal dans lequel nous sommes baigné.es. Il doit nous permettre de mieux
en comprendre ses différentes facettes pour que l'anarcha-féminisme puisse se
développer en le déconstruisant.
Cette
femme d'abord, bafouée au plus profond d'elle-même, par son mari, aura marqué
ce procès par son courage et sa volonté hors-norme de vouloir qu'il soit
public. Nous la remercions et nous lui adressons notre soutien le plus sincère
dans cette épreuve.
Cette
femme, elle aussi ordinaire, qui aimait son mari, considérait son couple comme
harmonieux, se retrouve face à des hommes d'une telle banalité que je, tu, elle
peut les rencontrer tous les jours sans imaginer une seule seconde la face
Mister HYDE de ces Docteurs JEKYLL qu'elle a pu croiser dans la rue pendant ces
dix ans. Certains sont venus plusieurs fois, certains infectés par le virus du
sida et ne se protégeant pas, certains ont demandé le mode d'emploi pour le
pratiquer à domicile, un autre, infirmier, a expliqué comment ajuster les doses
de somnifères, un autre encore est venu la nuit où sa femme a accouché.... Dans
la vie, ils font partie de Monsieur Tout le Monde : plombier, routier,
infirmier auprès de personnes âgées, d'enfants, commercial, chef de chantier,
journaliste....VIOLEUR, MOI ? NOOON !!!! Jeunes ou vieux, Et
crânement, ils rejettent la faute sur Monsieur qui a donné l'autorisation,
Madame, qui était sûrement d'accord ou faisait semblant de dormir....Bref,
l'ignominie à l'état brut.
Sur 51
personnes inculpées, tous des hommes, deux seulement ont refusé les
propositions du mari.
Attention, ce n'est pas tous les hommes, mais ce ne sont que des hommes !Comment en est-on arrivé là ! Notre société a engendré ces individus en leur inculquant des « valeurs » et un sentiment de supériorité tel que violer une femme endormie, qui ronfle, ne leur a posé aucun problème au moment du viol. Je pense à ce monsieur homosexuel qui s'est retrouvé à violer cette femme. Je me demande même comment un homme peut éprouver l'envie de pénétrer une femme comme ça. Parce que c'est un homme et qu'il a «le droit », la tout-puissance de faire ce qu'il veut de cette femme ? Elle dit s'être sentie transformée en « sac poubelle » lors de la vision de ces vidéos, « un morceau de viande » . C'est vrai que certains utilisent l'expression « se vider » !!!!
Nous allons faire une pause musicale plus légère avec Schumann ; Oui, Clara dont le talent a dépassé celui de Robert, son mari !!!!!Comme tout le monde le sait !!!! Il s'agit de trois romances opus 22 pour violon & piano. Elle est interprétée par Sini SIMONEN violoniste & Tanja ZAPOLSKA au piano. Http://esbjergensemble.
Dans
notre émission « femmes libres », nous décortiquons à notre manière,
ce qu'est le patriarcat. Toutes ces démonstrations sont confortées par cette
histoire qui résume l'horreur de ce monde : il fait de la femme un objet,
un être inférieur, qui peut être manipulée jusqu'à n'être rien.
Et si
il y a un fait qui me paraît très fort, c'est que Monsieur Tout le monde vit
dans notre entourage proche, qu'il pratique la culture du viol sans y penser,
que tout un ensemble de faits l'encourage implicitement peut-être un jour à
devenir violeur. Déjà plus de 452 000 personnes ont déclaré des violences
sexuelles en 2022 en France, que le nombre de plaintes annuelles est de 84 000 pour 2023, que autour de un % des plaintes déposées en
gendarmerie arrive au stade du procés. Les agresseurs sont à 96 % des hommes
d'après un rapport du service statistique du ministère de l'intérieur publié le
7 mars dernier. Une autre source, la dernière enquête de victimation menée
auprès de la population (« vécu et ressenti en matière de sécurité »
- VRS de 2022) montre que seulement 2 % des personnes de 18 à 74 ans victimes
de violences sexuelles hors cadre familial portent plainte auprès des services
de sécurité. Le manque de personnels, formés, chargés d'accompagner la
plaignante les incitent à reproduire les clichés généralement répandus sur les
femmes outragées : comment est-elle habillée, pourquoi n'est elle pas chez
elle à minuit, pourquoi sort-elle seule le soir ?....alors que nous savons
que la très grande majorité des femmes connaissent leur agresseur qui vit dans
leur entourage, et que les vêtements n'ont
pas d'importance. J'ajoute qu'une enquête IPSOS de 2020 estime que une
personnes sur dix aurait subi l'inceste et dans 8 cas sur dix, la victime est
une femme.
La société inculque les conduites viriles dès l'école, dans la rue, dans la religion, dans les conduites à tenir en public, en politique. C'est un ensemble de faits parfois tellement insignifiants que l'on hausse les épaules si on veut toujours être sur la brèche pour remettre les pendules à l'heure ; devoir se vêtir avec des codes masculins, l'écriture non inclusive, je comprends oui quand elle dit non, les blagues sexistes, la pornographie, les réseaux sociaux en général mais aussi certains dans lesquels sévit le mouvement masculiniste…. Mais ce que enfin nous pouvons évaluer, c'est l'importance des féminicides qui révèle que dans la sphère privée, l'homme peut avoir le pouvoir absolu et qu'il l'applique : une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son ami, amant, mari ou compagnon ou ex..... Quand on additionne tous les hommes qui ont utilisé cette culture du viol, ça fait beaucoup de monde !!!!! Et c'est justement le problème. Le patriarcat tue, humilie, affaiblit, maltraite avec banalité, avec une audience impressionnante.
Grâce à Gisèle, nous avons des témoignages qui dénonce comme jamais ce qu'est est aussi le patriarcat ; il est possible de mettre des mots sur cette horrible histoire qui n'est que le pic visible de l'iceberg PATRIARCAT qui rassemble tout ce que je viens de résumer, et plus encore.
Aussi, je reviens sur quelques constats qui relèvent de la culture du viol et peuvent nous faire réfléchir :
- le nombre de ces hommes qui ont fait ce crime en « toute bonne foi »,
–
la banalité de
ces individus dans leur vie quotidienne : CE NE SONT PAS DES MONSTRES HORS
NORMES, mais des MONSTRES NORMAUX façonnés par le patriarcat. Beaucoup ont eu
une vie classique sans trauma particulier. Certains parcours sont édifiants de
violence et de maltraitance mais ce n'est pas la majorité. Cela signifie que la
société les imprègne si fort qu'ils ne se rendent pas compte de la perversité
de leur comportement vis à vis des femmes.
–
l'incapacité
d'affronter la réalité ; ils se sentent dans leur bon droit !!!!,
–
le fait qu'ils
soient de bons parents, maris ou employés devraient absoudre leur crime
–
ils décident avec
le mari ce qu'ils doivent faire à cette femme inconsciente,
–
ils ne se
demandent pas si elle est consentante ou en capacité de donner son
consentement !
–
certains sont
soutenus pas leur compagne, leur famille qui ne comprennent pas et s'enfoncent
dans le déni.... , même si il y a « infidélité » !!!
–
malgré la
diffusion des vidéos et photos faites consciencieusement par l'ex-mari, ils
sont nombreux à refuser le qualificatif de «violeur »
–
L'association
« Mémoire traumatique & victimologie » a commandé un sondage à
IPSOS en 2021 qui indique que un français sur cinq ne considère pas comme un
viol le fait de forcer sa conjointe à avoir uun rapport sexuel.
La médecine (des hommes) n'a jamais pu répondre aux difficultés ressenties – par Gisèle : le médecin « traitant » qui a prescrit les médicaments anesthésiants, les gynécologues qui n'ont jamais compris ses douleurs...
–
la stratégie de
la défense qui ose les arguments les plus impensables tels que : « il
y a viol et viol et, sans intention de
le commettre, il n'y a pas viol. »
Je m'adresse aux ami.es anarchistes ; le féminisme n'est pas une valeur spontanée dans le milieu anarchiste !!! Pour moi, c'est d'ailleurs incroyable ! Ce qui signifie que les militantes et militants, sympathisantes et sympatisants anarchistes sont imprégné.es inconsciemment de cette culture. Il s'agit de faire un énorme travail de conscientisation pour regarder son propre comportement. Je pose donc la question : comment nous, anarcha-féministes, anarchistes, pouvons-nous appréhender cette fameuse culture du viol : qu'est-elle exactement ? Comment nous concernet-elle ? Comment la combattre ? Est-ce que cette question ne pourrait pas faire l'objet d'un travail collectif pour échanger et comprendre ce qu'il faut changer en soi et autour de soi ? Ces questions qui s'intègrent dans une pensée plus générale ne peuvent-elles aider à lutter aussi contre tout ce que le patriarcat englobe de façon à ce que l'idéal libertaire puisse vraiment avancer. Et cette histoire peut y aider, j'espère. Cela peut devenir un outil qui ferait aussi son chemin dans toutes les têtes de nous qui voulons un monde meilleur avec des idées que je trouve formidables. Et il me semble que les femmes et les hommes iront vers l'égalité quand le patriarcat sera complètement remis en cause.
Ce
procès continue jusqu'en décembre avec son lot de souffrances pour elle, de
prise de conscience pour eux ? La première chose que nous espérons toutes
avec Gis-le, C'EST QUE LA HONTE CHANGE DE CAMP.
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